30 avril 2019 – Etat des lieux des impacts territoriaux du changement climatique en France

Pour le deuxième numéro de sa revue de presse, Notre Affaire à Tous vous propose un état des lieux des impacts territoriaux du changement climatique en France ! Les prochaines revues de presse seront envoyées de manière mensuelle et sur des thèmes précis : aggravations des inégalités sociales, impacts sur les perspectives de la jeunesse, effets des hausses de chaleur sur nos territoires et la biodiversité… Pour continuer à recevoir cette revue de presse, abonnez-vous, et rendez-vous le 28 mai pour le prochain numéro !  

Nous avons aussi lancé un appel à témoins du changement climatique pour mettre des visages sur ces impacts et montrer la nécessité d’agir pour le climat et l’environnement. Témoignez, pour faire entendre votre voix et celle de toutes celles et ceux qui subissent un préjudice. 

  • Les chaînes de montagnes : sentinelles du climat en danger

Les chaînes montagneuses sont mises en danger par les activités destructrices du climat. Selon le bilan climatique dans les Alpes du Nord de l’Observatoire régional des effets du changement climatique (ORECC), en 2018, “l’année 2018 enregistre un écart de +2.35°C par rapport à la normale 1961-1990 et de +2°C par rapport à 1981-2010. C’est l’année la plus chaude jamais enregistrée sur les Alpes françaises”. Les conséquences de ce réchauffement rapide ? “Les glaciers des Alpes risquent de fondre à 90% d’ici 2100”, selon une équipe de chercheurs suisses qui insistent sur la nécessité de réduire les émissions de gaz à effet de serre. 

Les fontes des glaces vont aussi causer l’assèchement des cours d’eau et entraîner une potentielle émergence d’un conflit d’usage entre neige de culture et eau potable. Chaque année, 263 000 mètres cubes d’eau servent à la production de neige et permettent d’enneiger 35% du domaine. Pour l’heure, il n’y aurait pas de déficit en eau potable. 

Le phénomène de la fonte des glaces se retrouve ailleurs dans le monde, de l’Alaska, à la Patagonie, en passant par les Alpes. Les glaciers “ont perdu plus de 9 000 milliards de tonnes de glace depuis 1961, contribuant à l’élévation du niveau des mers”. Et les glaciers continentaux seront les plus touchés par le réchauffement que les calottes glaciaires du Groenland ou de l’Antarctique.

  • L’Occitanie : entre sécheresses, inondations, et diminution de l’enneigement

Avec un réchauffement attendu entre 2 et 7°C d’ici 2100, outre les impacts sur le tourisme, l’agriculture, ou la production hydroélectrique, la population devra se préparer à affronter davantage de phénomènes climatiques extrêmes, des risques naturels accrus, des réserves d’eau réduites et de qualité moindre, sans oublier les impacts sur la biodiversité. Le Pic du Midi a enregistré un record de chaleur, en été 2018, le plus chaud depuis 130 ans selon l’Observatoire des Pyrénées qui a relevé un record de plus de 100 jours sans gel. Météo France et des météorologistes espagnols ont montré qu’entre 1959 et 2010, “les températures moyennes dans les Pyrénées ont augmenté de 1,2 °C, bien que le réchauffement n’ait été ni constant, ni régulier.” 

Les territoires et les populations de l’Occitanie aussi sont particulièrement touchés par le changement climatique. Dans les Pyrénées par exemple, on note une diminution de l’enneigement, avec ses répercussions sur les rivières. Par ailleurs, il est estimé que la Garonne devrait perdre jusqu’à 30 ou 40% de son débit, avec des effets déjà visibles aujourd’hui. La fréquence augmentée des intempéries vient en revanche la faire déborder plus souvent, entraînant, outre des dégâts matériels, des risques sanitaires, comme suite aux inondations dans l’Aude en octobre 2018. Ces événements extrêmes touchent aussi les cultures, notamment celle du vin.

  • Bretagne : adaptation du territoire face à l’érosion du littoral, et la pollution

La Bretagne aussi fait face aux effets du changement climatique et des dégradations environnementales. C’est d’abord la hausse du niveau des mers qui inquiète, puisque une hausse de 1 mètre est prévue sur le littoral breton d’ici à 2100, ainsi qu’une hausse des coefficients de marées, provoquant l’érosion du littoral. Le rapport de l’Observatoire de l’environnement en Bretagne démontre que le climat est déjà impacté, notamment à cause des polluants venant de l’élevage de porcs ou du transport. 

Ce sont aussi les dégradations environnementales comme la pollution qui entraînent une détérioration de la qualité de l’air breton et près de 3000 décès par an. 3 départements étaient d’ailleurs en alerte aux particules fines en ce début de mois d’avril. 

Face à cela, collectivités, citoyens et associations agissent : à l’image de la métropole rennaise qui a adopté un plan climat ayant pour objectif de diviser par deux ses émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030, ou encore l’agglomération lorientaise qui enclenche une dynamique collective contre le changement climatique, autour du label européen Cit’ergie. C’est aussi une cinquantaine de citoyens rennais volontaires qui tentent de contrôler eux-mêmes la qualité de l’air pour alerter et susciter une prise de conscience auprès des habitants.

  • Alerte sécheresse en avril, en Hauts-de-France : le symbole de l’urgence

Depuis le 9 avril 2019, la région des Hauts-de-France, à l’exception du delta de l’Aa, se trouve en alerte sécheresse, et ce, jusqu’au 30 juin 2019. De lourdes restrictions sont ainsi imposées pour faire face au déficit pluviométrique : de l’interdiction de laver les véhicules pour les particuliers, à la restriction de l’irrigation pour les agriculteurs en passant par un objectif de réduction de consommation d’eau de 10% pour les industriels. 

La préfecture de l’Aisne avait déjà restreint la consommation d’eau dans le département à la fin du mois d’octobre 2018 pour la même raison. Cette situation a un impact très fort notamment dans les zones agricoles : certains départements français ont d’ailleurs été reconnus en état de « calamité agricole » en décembre 2018

L’hydrologue Emma Haziza alerte sur les risques d’accroissement des périodes de sécheresse, en alternance avec des épisodes d’inondations majeurs. Elle signale que « pour arrêter de subir, il faut revoir en profondeur la manière dont on pratique notre usage des sols en France ». Des solutions efficaces peuvent être mise en place, sur le modèle de la ville de Loos-en-Gohelle qui a profité de la révision du plan d’occupation des sols et est finalement devenu un modèle en matière de transition écologique et sociale.

  • La Nouvelle-Aquitaine face au danger de la mer

L’érosion du littoral est la principale conséquence du réchauffement climatique en Nouvelle-Aquitaine. La hausse du niveau de l’Océan Atlantique provoque une diminution inexorable du trait de côte.Le Groupement d’Intérêt Public du Littoral Aquitain estime à 160 les logements menacés à court terme par l’érosion côtière et porte le chiffre à 5.800 d’ici 2050. Un des symboles de la problématique de l’érosion côtière ? Le Signal, un immeuble de 4 étages, qui à sa construction entre 1965 et 1970 à Soulac-sur-Mer, se trouvait à 200 mètres de l’océan. Depuis, “la plage a avancé de 4,5 mètres par an”. Mais dans les terres aussi, la problématique de la montée des eaux se fait déjà ressentir, comme dans le Marais Poitevin,largement en dessous du niveau de la mer, où le risque de submersion du territoire va augmenter. 

La région Nouvelle-Aquitaine a d’ailleurs fait l’objet de plusieurs études sous la direction du climatologue Hervé Le Treut, sur les impacts du changement climatique et sur l’anticipation des changements climatiques par les territoires et les populations.

  • Outre-Mer : les injustices climatiques en première ligne

Les territoires et populations d’outre-mer sont aussi particulièrement touchés par le dérèglement du climat. La question des injustices climatiques y est encore plus prégnante. Alors que les territoires d’outre-mer français représentent quasiment 0% des émissions de gaz à effet de serre de la France, ils sont les plus vulnérables et les premiers impactés. Au delà de leur position géographique, le combat est non seulement celui de la justice climatique mais aussi de la justice sociale. Le prisme de l’histoire coloniale est à prendre en compte dans l’étude de ces inégalités climatiques. 

Ces inégalités s’illustrent d’ailleurs par l’ouragan Irma de septembre 2017. A Saint-Martin, un appel à la grève générale a été lancé, jeudi 11 avril 2019, par des syndicats et des collectifs pour dénoncer les suites de l’ouragan, avec des revendications concernant les reconstructions, le maintien du service public, ou encore la résolution d’un conflit social à la collectivité. Symbole des inégalités, Saint-Martin cumule aléas climatiques et forte vulnérabilité, exposée à des cyclones de plus en plus intenses et fréquents, et l’insuffisance des mesures de prévention et réduction des risques. Les populations s’en relèvent difficilement à cause d’un accompagnement post-catastrophe trop faible et la lenteur de la reconstruction.

Les impacts sur la nature aussi sont très visibles : les coraux de la Polynésie Française sont particulièrement menacés. On remarque dès maintenant une accélération de leur blanchissement à cause des températures trop élevées de l’Océan Pacifique. Malgré ces effets, les décideurs politiques ne semblent pas comprendre l’ampleur de l’urgence, puisque le Parlement Européen a voté, le 4 avril dernier, une loi pour subventionner le secteur de la pêche pour la période 2021-2027, qui aura notamment des effets désastreux sur la biodiversité des “régions ultrapériphériques européennes” (dont la Guadeloupe, La Réunion, Mayotte, La Guyane, La Martinique, Saint Martin).

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