Quelles suites pour le #RecoursClimatCitoyen ?

Accompagnatrice du Recours Climat Citoyen porté par 10 familles contre les législateurs européen depuis son dépôt le 24 mai dernier, Notre Affaire à Tous était représentée les 3 et 4 juillet dernier au workshop organisé par le Climate Action Network sur les recours en justice en matière climatique, à Bruxelles.

Ce fut l’occasion pour l’ensemble des organisations parties prenantes de la communication et de l’accompagnement des familles plaignantes partout en Europe de se rencontrer pour la première fois, près d’un mois et demi après le dépôt du recours devant la Cour de Justice de l’Union Européenne. Un grand succès en terme de couverture médiatique, mais aussi de mobilisation citoyenne !

En effet, lors du dépôt du recours, des conférences de presse ont été coordonnées depuis Bruxelles, Paris, Stockholm, Varsovie et Turin, tandis que des points presse étaient aussi organisés en Roumanie et au Portugal. La première semaine à la suite du dépôt du recours, 254 articles mentionnaient le CAN Europe dans leurs articles sur le People climate’s case ; 132 articles mentionnaient des membres du CAN Europe ; plus de 50 émissions de radio et de TV ont mentionné l’événement. Nous sommes heureux d’avoir pu participer à ce beau succès, une telle communication permettant, en plus de sensibiliser l’opinion publique à ces enjeux, d’apporter une pression supplémentaire aux décideurs publics pour qu’ils atteignent les ambitions nécessaires à la préservation du climat et des droits humains fondamentaux qui en sont affectés.

Retrouver le dossier de presse de Notre Affaire à Tous à l’occasion de la sortie du recours

Découvrir les différentes couvertures presse du recours en France

Début juillet, les avocat-es, sur requête du juge, ont soumis une version plus courte de la plaidoirie à la cour, réduisant le recours de 60 pages à une trentaine. L’ensemble des plaignant-es attendent aujourd’hui la publication du #PeoplesClimateCase au Journal Officiel, suite à quoi s’ouvriront six semaines pendant lesquelles de nouvelles parties pourront se déclarer ‘intervenantes’ dans le recours, dont le jugement pourrait s’étaler sur des années, au vu de l’unicité de celui-ci.

En effet, le Peoples Climate Case est unique en son genre, en étant le premier recours déposé à cette échelle en matière climatique, et en intégrant deux fondements :

  • Une action en annulation,  sur trois régulations européennes (ETS, ESR/CAR et LULUCF/UTCATF) au motif qu’elles constituent une violation des droits fondamentaux des plaignants et un manquement au droit communautaire de rang supérieur et au droit international – notamment des accords de Paris, en autorisant des émissions de GES trop importantes d’ici 2030. L’action en annulation s’appuie sur l’article 263 du TFUE.
  • L’injonction fondée sur la responsabilité non-contractuelle: les demandeurs allèguent qu’au vu des dommages d’ores et déjà causés aux biens, aux revenus et à la santé, l’UE doit réduire tant que faire se peut ses émissions de gaz à effet de serre afin de réparer et de prévenir des dommages supplémentaires. L’action en responsabilité non-contractuelle s’appuie sur l’article 340 du TFUE.

À partir de maintenant, quels scénarios juridiques possibles ? 

Plusieurs scénarios juridiques sont envisageables sur la suite que pourrait prendre ce recours, selon les décisions qui seront prises par le juge en charge de l’affaire, et les réactions de la défense (Parlement Européen et Conseil Européen, législateurs européens, qui sont visés par le recours).

  • L’ouverture d’une procédure écrite: la procédure écrite ouvre une période de deux mois pendant lesquels la défense se verra offrir un droit de réponse, avant d’engager des suites
  • La scission (Split-up) : puisque la plainte repose sur deux parties (annulation des actes juridiques et responsabilité non-contractuelle), la Cour peut décider de séparer en deux le recours, et de se centraliser sur une seule de ces parties : l’action en annulation ou l’action fondée sur la responsabilité non contractuelle, avant de continuer son jugement
  • Une procédure d’admissibilité : la Cour peut décider d’examiner l’admissibilité de l’action en annulation des 3 actes juridiques : le jugement se ferait alors sur la forme du recours plus que son contenu.
  • L’ouverture d’une procédure d’enquête et d’expertise : le recours comprend une demande de procédure d’investigation. Dans ce cas, des experts extérieurs enquêteront sur les liens de causalité effectifs entre émissions de gaz à effets de serre, dérèglement climatique et impacts sur les droits humains fondamentaux des plaignant-es.
  • Une demande d’audience : la Cour peut demander une audience à n’importe quel moment sur le “mérite”.

Aujourd’hui, les discussions en cours à l’échelle européenne semblent présager un réhaussement prochain des ambitions climatiques et de réduction des émissions de gaz à effet de serre de l’Union Européenne. C’est une excellente nouvelle, qui, si elle est mise en oeuvre de manière concrète, au travers de lois et de dispositions coercitives, pourrait réellement permettre à l’Europe d’être leader en matière climatique dans le monde. Cependant, les plaignant-es, tout autant que les associations et chercheurs-euses accompagnant ce recours, restent prudent-es : seuls des objectifs à la hauteur des exigences du Peoples Climate Case seraient considérés comme acceptables, et ceux-ci ne satisfairont l’ensemble des parties prenantes qu’avec de réelles pistes de mise en oeuvre, au niveaux national et européen.

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