Mercredi 23 septembre, le gouvernement a adopté la loi ASAP (loi d’accélération et de simplication de l’action publique) qui porte un coup supplémentaire au droit de l’environnement concernant notamment les sites industriels. Ignorant le fait que la catastrophe de Lubrizol a fait naître un sentiment d’insécurité vis à vis des installations classés, le gouvernement fête cet anniversaire en diminuant, encore un peu plus, les procédures protectrices au profit de la productivité industrielle.
Lubrizol : rappel des faits
Entre le 26 et 27 septembre 2019, 10 000 tonnes de produits chimiques avaient brûlé sur le site de l’usine chimique Lubrizol et sur celui de son voisin, Normandie Logistique. Un nuage de fumée noire de 22 km de long s’était formé. L’incendie n’avait pas fait de blessé, mais les conséquences à long terme sur la santé et l’environnement restent extrêmement incertaines.
Quelques jours auparavant, le 23 septembre 2019, le rapporteur de la commission spéciale sur la loi ASAP, Guillaum Kasbarian, député LREM d’Eure-et-Loir, remettait au gouvernement un Pacte productif proposant des chantiers pour simplifier et accélérer les installations industrielles. Ce rapport prévoyait notamment :
- De sécuriser les porteurs de projet notamment face aux changements réglementaires en cours de procédure, d’anticiper les procédures en mettant à disposition des entreprises des « sites industriels clés en main ».
- D’accélérer les délais au cas par cas en tenant compte de la réalité des territoires, et d’accorder plus de pouvoir au préfet en matière industrielle pour qu’il pilote les procédures et assure la coordination des administrations.
Malgré cette catastrophe qui a eu lieu dans les quelques jours suivant ce rapport, cela n’a aucunement remis en cause cette volonté de moins informer, de moins évaluer afin d’industrialiser plus, et en moins de temps. Le gouvernement a donc choisi de ne pas renoncer au pacte productif au profit des industriels, et au détriment de notre santé.
La loi ASAP et les sites industriels “clés en main”
Le procédé de sites industriels “clés en main”, annoncé au sommet Choose France en janvier 2020 et réaffirmé par communiqué de presse le 20 juillet 2020 désigne 78 sites pour lesquelles certaines procédures environnementales pourront être simplifiées, accélérées et purgées de délais. Cette démarche se simplifie avec les dispositions de la loi ASAP, autre volet de ce pacte productif, qui sera votée dans les prochains jours par l’Assemblée Nationale.
La loi ASAP traite notamment des Installations Classées pour la Protection de l’Environnement (ICPE). Les dispositions de cette loi portent atteinte au principe de participation du public en offrant une possibilité élargie de procéder à des consultations par voie électronique plutôt qu’à des enquêtes publiques telles que nous les connaissons.
Cette loi ouvre la possibilité d’entamer les travaux sur décision du préfet alors que l’autorisation environnementale n’a pas encore été obtenue. Cette autorisation environnementale pourra maintenant être facilement “transférée” du pétitionnaire vers un autre maître d’ouvrage. Dès lors, les maîtres d’ouvrage pourront se voir dispensés d’obtenir certaines autorisations et donc pour commencer leur activité sans délais, au risque que celle ci ne soit pas adaptée à l’installation exploitée. Enfin, l’avis de la commission consultative en matière de risques technologiques se voit supprimé pour certaines installations.
Pour Chloé Gerbier, juriste de Notre Affaire à Tous : “Un an après la catastrophe de Lubrizol, quelques mois après celle de Beyrouth, et en pleine crise sanitaire due à une zoonose, le gouvernement n’a rien appris et diminue les protections relatives aux installations industrielles d’une part et à la protection de l’environnement d’autre part, et cela au profit, évidemment, du secteur industriel et de la relance économique.”
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