La France, sous couvert du respect de ses engagements du Protocole de Kyoto, a en réalité un impact plus élevé aujourd’hui sur le phénomène de réchauffement climatique mondiale, qu’elle n’en avait en 1990 ! En effet, les chiffres montrent que de 1990 à 2007, l’empreinte carbone par français a augmenté de 5 %, alors que dans le même temps, le niveau moyen des émissions sur le territoire de la France, diminuait de 15 %.
L’empreinte carbone, définition et chiffres clefs
Selon la définition donnée par le Commissariat au Développement Durable, “le calcul de l’empreinte carbone d’une population vise à estimer la quantité de GES émise pour satisfaire sa consommation au sens large (biens, services, utilisation d’infrastructures), en tenant compte des émissions liées aux importations et aux exportations. Cette empreinte permet ainsi d’apprécier la pression exercée à l’échelle planétaire sur le climat (bien public mondial) par la population du pays considéré”.
Les chiffres connus sont encore assez fluctuants. En fonction des schémas choisis, les résultats peuvent, en effet, être très différents. Alors que la méthodologie retenue par le Commissariat au Développement Durable fait état d’une augmentation de l’empreinte carbone française à hauteur de 4.7 % entre 1990 et 2010, une étude fondée sur une méthodologie différente (Paillat, Adam et Wilmotte, 2011) estime que celle-ci aurait en fait augmenté de 25 % entre 1990 et 2010.
D’après l’estimation retenue par le Commissariat au Développement Durable : rapportée à la taille de la population, l’empreinte carbone d’un Français est donc en moyenne de 12,2 t CO2 e, contre 8,2 t pour les mêmes GES émit sur le territoire, soit une augmentation de près de 50% de la moyenne “officielle”.
Ces chiffres, même s’ils peuvent encore être précisés, mettent en évidence que la France n’est pas parvenue à diminuer ses émissions au niveau mondial, contrairement à ce que pourrait laisser croire les relevés effectués dans le cadre du Protocole de Kyoto (qui ne s’applique qu’aux émissions produites sur le territoire national et dans des secteurs définis par la convention).
Un phénomène mondial de transfert des émissions de GES
Etant donné la désindustrialisation croissante que connaît le territoire francais malgré l’accroissement continu de la demande finale intérieure, il faut partir du principe que la courbe de l’empreinte carbone n’est pas prête de s’inverser.
Plus important, il faut observer que depuis 1990, l’année de base des engagements du Protocole de Kyoto, certaines études démontrent l’existence d’un phénomène de « transfert » des émissions de CO2 de l’ensemble des états membres à la convention, vers des pays tiers. Les premiers ont stabilisé leurs émissions sur leur territoire, alors que les émissions de CO2 liées à leurs importations en provenance des pays hors du protocole n’ont, quant à elles, jamais cessé d’augmenter. L’ensemble de ces émissions “transférées” aurait plus que doublé depuis 1990.
Ce phénomène démontre la nécessité d’une démarche mondiale en matière de lutte contre les émissions de GES, car comme le rappelle France Stratégie dans son rapport d’avril 2016, « l’Humanité doit parvenir, dans la seconde moitié de ce siècle, à un monde qui absorbe autant de carbone qu’il en émet« .
Or, il existe encore un décalage entre l’objectif de limiter à 2°C l’augmentation de la température et les engagements – insuffisants – pris par les différents pays pour 2030.
Les nouveaux objectifs chiffrés de la France, actuellement en cours d’élaboration au niveau de l’Union européenne, ne doivent pas nous faire oublier l’objectif de neutralité carbone, le seul objectif scientifiquement et intellectuellement admissible afin de se donner les moyens nécessaires pour stabiliser la température à +2°C.