Le 22 avril 2018, Jour de la Terre, Notre Affaire à Tous, CliMates, WARN et le REFEDD ont lancé un Appel pour une Constitution Écologique sous le nom de “Notre Constitution Écologique”. L’objectif est d’inciter le gouvernement et les parlementaires à inscrire à l’article 1er de la Constitution la protection du climat et de la biodiversité, mais aussi le principe de non-régression et la reconnaissance des limites planétaires. Une portée très symbolique puisque l’article 1er énonce les principes fondateurs de la République française, mais aussi un outil juridique, après le passage de l’Affaire du Siècle.
Ce mercredi 28 août 2019, l’exécutif a dévoilé son nouveau projet pour l’article premier de la réforme constitutionnelle, désormais rédigé ainsi : « la République favorise toutes les actions en faveur du climat et de la biodiversité ». Or, en 2018, la proposition adoptée par l’Assemblée Nationale imposait une obligation à l’Etat d’agir en matière de protection de l’environnement. Par ce revirement, le Président de la République fait en toute conscience et connaissance de cause le choix de phrases creuses, et non contraignantes.
Où en est la réforme constitutionnelle ?
Le 3 juillet 2017, le Gouvernement annonce une réforme constitutionnelle visant à inscrire “l’impératif de lutte contre le changement climatique à l’article 34, qui définit le domaine de la loi”. Un important premier pas puisque la Constitution établit les lois fondamentales qui régissent notre société. Cependant, l’article 34 de la Constitution, qui se contente de définir le domaine de la loi, est loin de satisfaire les différentes ONG environnementales.
Notre Affaire à Tous entame alors un travail inter-associatif avec diverses structures, notamment la Fondation pour la Nature et l’Homme, pour rédiger une proposition d’amendement à l’article premier de la constitution. L’association s’allie avec les organisations de jeunesse CliMates, le REFEDD et le WARN pour porter une pétition citoyenne, en parallèle du travail de plaidoyer auprès des parlementaires, sous le nom de “Notre Constitution Ecologique”, signée à ce jour par plus de 100 000 citoyen-nes.
Au mois de juillet 2018, l’Assemblée Nationale permet une avancée symbolique dans la protection du climat et de la biodiversité en intégrant ces deux notions dans l’article 1er de la Constitution française grâce à l’amendement déposé par l’ex-Ministre de l’Ecologie Nicolas Hulot: « La République agit pour la préservation de l’environnement et de la diversité biologique et contre les changements climatiques ». La nouvelle formulation présentée par la Garde des Sceaux, Nicole Belloubet, lors du Conseil des Ministres du 28 août 2019, remplace le terme “agir” par “favorise”. Ce changement fait suite à un avis prévenant du Conseil d’Etat. Les termes retenus signalent une simple incitation à préserver notre environnement, alors même que les forêts du monde brûlent.
La formulation adoptée par l’Assemblée Nationale en 2018 laissait déjà beaucoup (trop) de parts d’ombre alors que le projet initial, porté par Notre Affaire à Tous, proposait d’inscrire deux principes majeurs que sont la reconnaissance des limites planétaires et le principe de non-régression. Nous considérons que cet amendement est insuffisant pour garantir une préservation efficace de nos ressources et une action ambitieuse dans la lutte contre les changements climatiques.
Notre proposition de loi
“La France est une République indivisible, laïque, démocratique, sociale, solidaire et écologique. Elle assure l’égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d’origine, de race ou de religion.*
La République veille à un usage économe et équitable des ressources naturelles, garantit la préservation de la diversité biologique et lutte contre les changements climatiques dans le cadre des limites planétaires. Elle assure la solidarité entre les générations. Une génération ne peut assujettir les générations futures à des lois moins protectrices de l’environnement que celles en vigueur.
Elle respecte toutes les croyances. Son organisation est décentralisée.
La loi favorise l’égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives, ainsi qu’aux responsabilités professionnelles et sociales.”
* Un amendement voté à l’unanimité à l’Assemblée Nationale 12 juillet a proposé la modification suivante : « sans distinction de sexe, d’origine ou de religion« .
Nous défendons
- L’inscription des limites planétaires dans la Constitution
La notion de limites planétaires a été établie par une équipe de scientifiques en 2009 dirigée par Johan Rockström et Will Steffen. Cette notion fait référence à 9 processus régulant la stabilité de la planète Terre et qui fournissent, ensemble, les conditions de vie dont nos sociétés dépendent. Dit plus simplement, il s’agit de 9 seuils à ne pas franchir pour ne pas dépasser ce que la planète peut nous offrir. Ces 9 systèmes sont (i) le climat, (ii) la biodiversité, (iii) les apports de phosphore et d’azote aux sols et aux océans, (iv) l’usage des sols, (v) l’acidification des océans, (vi) la couche d’ozone stratosphérique, (vii) l’usage de l’eau douce, (viii) les aérosols atmosphériques et (ix) la pollution chimique. Par exemple, le seuil des 2 °C pour le réchauffement climatique est une de ces limites que les scientifiques nous conseillent de ne pas franchir. Ces limites planétaires ont été reconnues officiellement par l’ONU en 2012. Aujourd’hui, quatre de ces limites ont été franchies, dont la biodiversité et le climat, et mettent gravement en péril notre écosystème. Inscrire les limites planétaires dans la Constitution permettrait donc de poser un cadre de référence contraignant et de garantir la stabilité de la vie sur Terre.
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- L’ajout du principe de non-régression dans la Constitution
Le principe de non-régression interdit tout retour en arrière, toute réduction du niveau d’engagement et de protection de l’environnement. Ainsi, une génération ne peut assujettir une génération future à des lois moins protectrices de l’environnement que celles en vigueur. Ce principe est nécessaire pour garantir la conservation des acquis en matière de protection de l’environnement.
Pourquoi la Charte de l’Environnement ne suffit pas
Les bons élèves se rappelleront sans doute qu’il existe déjà une Charte de l’Environnement, inscrite en 2014 dans le préambule de la Constitution et qui introduit 10 principes fondamentaux en faveur de l’environnement. Néanmoins, cette Charte de l’Environnement reste peu utilisée et ne mentionne pas expressément le terme “climat ».
Dans ce cas, pourquoi ne pas modifier la Charte de l’Environnement ? La Charte a introduit les principes de précaution, de prévention et de pollueur-payeur. Ne pas la modifier permet d’éviter un nouveau débat qui pourrait porter atteintes aux principes qui y sont déjà intégrés et amoindrir leur portée.
Notre Affaire à Tous se mobilise pour une réforme constitutionnelle ambitieuse et écologique. La France rejoindrait la Norvège, la Suisse, l’Espagne, l’Equateur, le Mexique qui ont déjà franchi le pas ! Alors hors de question de reculer sur un sujet aussi important !